Liste conduite par M. Caron
THÈME 1 – Le rôle des élus locaux
1) Le risque zéro, en matière de catastrophe industrielle, n’existe pas. Cependant,
après l’incendie qui s’est développé dans les deux entreprises Lubrizol et
Normandie Logistique, quelles propositions défendrez-vous, en ce qui
concerne l’urbanisation autour des zones SEVESO ?
En septembre dernier, nous avons vécu une réelle catastrophe qui a suscité une angoisse légitime chez chacun d’entre nous et a impacté notre territoire et son attractivité. Cet événement doit nous servir de leçon : nous nous référons au PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal) afin de limiter l’urbanisation autour de ces zones SEVESO. Concernant l’éco- quartier Flaubert, nous considérons que toute initiative qui permet de développer notre ville, de l’enrichir et de la renforcer ne peut qu’être positive, mais qu’un tel projet ne peut être mené à son terme au détriment de la sécurité et de la santé des 15 000 personnes qui seront amenées à y vivre ou y travailler.
2) Vous engagez-vous à refuser l’implantation de toute nouvelle usine
SEVESO ?
Dès notre arrivée à la mairie de Rouen, nous veillerons à accompagner le milieu industrialo- portuaire présent depuis plusieurs siècles sur notre territoire, pour qu’il fasse de la transition écologique un enjeu central de son fonctionnement et de son avenir. C’est tout un système qui est à repenser et à faire évoluer, et ensemble, nous avons l’opportunité de faire de Rouen la ville exemplaire, la ville référence, capable d’allier développement durable et développement économique soutenable. Cela passe par la reconversion des industries et des friches industrielles, ce qui est déjà en cours dans la métropole rouennaise, comme à Petit-Couronne avec le site de l’ancienne raffinerie Pétroplus.
3) Quel partenariat proposeriez-vous pour engager, avec les entreprises
SEVESO, une réflexion destinée à réduire les risques technologiques et
industriels ?
Cette question se pose dans de nombreux territoires. Services de l’État, collectivités locales, entreprises concernées : chacun doit prendre les responsabilités qui sont les siennes et participer à une réflexion commune sur le maintien des usines SEVESO près des habitations. Plus globalement, nous devons agir sur plusieurs leviers afin de limiter le risque technologique et industriel sur le territoire : réduction du risque à la source par les entreprises, maîtrise et adaptation de l’urbanisation aux alentours, organisation de moyens et de sources d’information clairs et précis auprès du public. Le PPRT (Plan de prévention des risques technologiques) doit être revu, en priorité pour les installations classées Seveso seuil haut, et l’ensemble des acteurs doit s’assurer de son respect le plus strict. La protection des habitants et de la vie de la cité n’a pas de prix !
4) Quelles mesures proposeriez-vous pour protéger la métropole et ses
habitants, et au-delà, la région normande, des risques encourus, liés à la
présence d’usines SEVESO au centre d’une métropole ?
C’est tout un bassin de vie que nous devons protéger par des mesures fortes. C’est pour cela que la coordination de la communication et les mesures de sécurité sont à renforcer et à maintenir à chaque instant sous contrôle. Par ailleurs, nous devons revoir et faire connaître nos dispositifs d’alerte et de protection des populations : le 26 septembre dernier, tout le monde était dans l’attente et l’incertitude. Nous ne voulons pas revivre cette période de flou, et cela passe par le développement d’une culture du risque au sein de nos écoles, entreprises, lieux d’habitation.
5) Que pensez-vous d’une reprise d’activités dans l’usine Lubrizol de Rouen ? À
quoi conditionnez-vous une éventuelle réouverture de l’usine Lubrizol ?
Quel sera votre projet économique et social si l’usine ne reprend pas ses
activités ?
Précisons que cette reprise d’activités est très partielle, du fait de la destruction d’une grande partie de l’outil industriel. Malgré l’incendie, cette entreprise est importante pour le dynamisme économique et industriel de notre région, il paraît naturel que son activité reprenne progressivement, tant que cela se fait dans le respect des règles de sécurité et sous le contrôle renforcé des autorités. A terme, même si cela n’est pas du ressort du maire, nous souhaitons vivement que les contrôles auprès de ces installations à risque débouchent sur des mesures plus contraignantes.
THÈME 2 – Sécurité et Prévention
6) De nombreux plans de prévention existent déjà (PPMS, PPI, PPRT, PPRN),
quelles propositions feriez-vous pour harmoniser ces plans et pour les
rendre plus opérationnels et plus efficaces ?
En effet, de nombreux plans de prévention existent aujourd’hui, avec chacun sa spécificité. Le PPRN vise par exemple à prévenir des risques naturels prévisibles. Le PPRT a pour objectif quant à lui d’apporter une réponse aux situations difficiles en matière d’urbanisme héritées du passé et de mieux encadrer l’urbanisation future autour des établissements SEVESO seuil haut existants, à des fins de protection des personnes. Nous le voyons bien, ces différents plans sont donc complémentaires et proposent une méthode pour faire face à une situation particulière. Pour une meilleure application de ces plans en cas de déclenchement et pour les rendre plus opérationnels, il faut avant tout une meilleure coopération et communication entre les différents acteurs qui appliquent ces plans, une meilleure préparation et une vraie anticipation des risques. La concertation est essentielle pour mieux prévenir la population !
7) Quelles propositions feriez-vous pour optimiser la prévention auprès de la
population ? Et, plus précisément, comment améliorerez-vous l’information
auprès des populations et comment développerez-vous la culture du
risque ?
La culture du risque est définie par le Ministère de la Transition écologique et solidaire : « C’est la connaissance par tous les acteurs (élus, techniciens, citoyens, etc.) des phénomènes naturels et l’appréhension de la vulnérabilité. L’information des populations, et ceci dès le plus jeune âge, est le moteur essentiel pour faire progresser la culture du risque. Celle-ci doit permettre d’acquérir des règles de conduite et des réflexes, mais aussi de débattre collectivement des pratiques, des positionnements, des enjeux, etc. Développer la culture du risque, c’est améliorer l’efficacité de la prévention et de la protection. En faisant émerger toute une série de comportements adaptés lorsqu’un événement majeur survient, la culture du risque permet une meilleure gestion du risque. » Mettre en place cette culture du risque s’apprend donc dès le plus jeune âge avec des mises en situation à l’école et se poursuit en concertation avec les entreprises du territoire pour que des exercices d’entraînement et des sessions régulières d’information soient proposées aux salariés. La ville se devant d’être exemplaire, les agents municipaux seront eux aussi invités à s’informer et se former pour être en capacité de réagir. Sur une ville comme Rouen, cela peut se faire en lien direct avec la Métropole, le Département, la Région et la Préfecture
La loi « Risques » du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages s’inscrit dans le cadre d’un plan d’actions global avec plusieurs priorités dont l’une d’entre elle est de définir une nouvelle méthodologie et un nouveau périmètre pour les études de danger des sites industriels. Pour revoir l’étendue des périmètres de sécurité autour des usines à risques, il faudrait donc revoir la loi et les spécificités des sites SEVESO. Cela ne dépend donc pas des compétences d’un maire. En revanche, prendre la décision d’évacuer plus rapidement la population en cas d’accident, de mettre en place la communication la plus rapide et adaptée qui soit (alertes sonores, documents d’information distribués à la population habitant dans une zone proche d’un site à risques définie par la ville…) sont des actions possibles auxquelles nous devons réfléchir pour garantir la sécurité de chaque Rouennaise et chaque Rouennais.
8) Seriez-vous d’accord pour soutenir une proposition permettant à un
organisme agréé, indépendant de la DREAL, un audit des équipements et
des procédures de sécurité dans les entreprises à risques (SEVESO et non
SEVESO) ?
La DREAL est un organisme officiel, rattaché aux services de l’État dont l’une des compétences est de « veiller à la sécurité des territoires face aux risques technologiques et aux risques naturels ». De fait, il ne s’agit pas de substituer un organisme indépendant à la DREAL. En revanche, il convient là encore de renforcer la coopération avec la DREAL et insister davantage sur la dimension de prévention des risques en multipliant les audits d’équipements et de procédures de sécurité dans les entreprises à risques. Cela passe par redéfinir une nouvelle méthode, plus opérationnelle puis par une intensification des contrôles, en priorisant les sites les plus à risque.
9) Comment évacuer, selon vous, la métropole rouennaise et ses environs
en cas de catastrophe industrielle ou technologique majeure ?
Oui, nous devons réfléchir à la mise en place d’un entraînement à l’évacuation de la métropole rouennaise en cas d’alerte technologique ou industrielle, une fois par an.
Le Maire de Rouen doit être le premier garant de la sécurité de ses habitants. Il est de son devoir d’assurer une information claire, rapide et compréhensible par tous en cas d’accident sur un site à risques qui représenterait une menace pour les habitants. Pour cette raison, la coopération entre les services de l’État, la Ville, la Métropole, le Département et la Région doit être renforcée. Un protocole de gestion de crise doit être rédigé et maîtrisé par l’ensemble des acteurs, des exercices d’entraînement doivent être organisés. Nous devons nous fixer un objectif clair : que chaque acteur institutionnel, à son niveau, soit prêt à faire face à une crise de cette ampleur, soit en capacité de se mobiliser et de réagir, en parfaite concertation et coordination avec les personnes concernées.
THÈME 3 – Communication
10) Tout le monde s’accorde pour constater que la communication à l’égard des
populations, depuis le 26 septembre, a été défaillante. Quelles propositions
feriez-vous pour l’amélioration de cette communication ? Et comment
vous investiriez-vous dans cette amélioration ?
La mise en place d’un protocole de mise en sécurité est à envisager sérieusement en cas d’incertitude. Dans un premier lieu à destination des personnes les plus fragiles et vulnérables (enfants, personnes âgées, etc.) afin de ne prendre aucun risque. On ne doit pas jouer avec la vie de nos concitoyens et il est préférable de mettre en sécurité de manière préventive plutôt que de laisser dans le doute et l’incertitude les Rouennaises et les Rouennais, en prenant le risque de les exposer à des plus grands dangers. Cela doit s’accompagner et être prévu, là aussi dans un protocole parfaitement réfléchi et maîtrisé, toujours dans un souci d’efficacité.
Réponses reçues le 12 mars 2020